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Petit lexique à l’usage des adhérents (4/4, ouf !)

… suite et fin de la série Petit Lexique à l’usage des adhérents 1/4 , 2/4 et 3/4

 « Se poser »

Se poser (verbe pronominal)

  • Familier. S’asseoir quelque part, s’y arrêter : « Pose-toi là et ne bouge plus ».

(Dictionnaire Larousse)

Voilà qui relève parfois de la gageure. Bien sûr, je ne parle pas du chien, mais du maitre. Se poser, rester calme, ne plus bouger, arrêter de gigoter. L’adhérent sait pourtant très bien utiliser ce mot :

C’est pénible, Kaizer, il ne se pose jamais.

Effectivement, Kaizer est sans cesse en mouvement en bout de laisse. Son maitre aimerait bien pouvoir écouter le débrief tranquillement, sans avoir un tortillon incapable de rester immobile deux secondes.  Vilain, vilain Kaizer ! Si ça se trouve, il est « hyper-actif » et nécessite un traitement !

Regardons mieux la scène. Madame Stressée essaie de mettre Kaizer « assis » pour écouter le « debrief ». Elle pourrait juste lui laisser trouver sa position lui-même, du moment qu’il ne lui arrache pas l’épaule en tirant. Le moniteur avait justement bien indiqué :

Venez au milieu ! Et posez-vous tous quelques minutes, qu’on en profite pour faire le point sur le cours.

Mais non, Madame Stressée exige une position de contrôle. Un bon vieux « assis-pas-bouger » de derrière les fagots.

Elle donne 4 fois l’ordre à son chien, qui est très occupé à regarder tout ce qui se passe autour. Elle est donc obligée de tripatouiller la laisse un certain nombre de fois, en « faisant de la mayonnaise » avec ses mains. Au 4ème commandement, Kaizer pose enfin ses fesses. Elle se penche vers lui pour lui donner une consigne supplémentaire :

« Pas bougeeeeeer !! »

Bah oui, des fois qu’un chien assis puisse bouger, hein?

Elle se redresse, se remet face au moniteur pour profiter enfin du discours (forcément passionnant) qu’il délivre. Kaizer tient péniblement sa place en couinant. Sa maitresse rajoute donc un « Tais-toi, reste tranquille ! ». Kaizer couine de plus belle, en piétinant des antérieurs, à croire qu’il s’est assis sur un bouquet de houx.

Madame Stressée se penche vers lui, en répétant son nom pour attirer son attention.

Il s’est déjà remis debout, et se met à faire le Yo-yo devant elle. Elle se retourne vers son chien, tente de le ramener 5 fois à sa place, en répétant incessamment  :

Kaizer. Kaizer ! Assis.

Assis Kaizer !

Assis. Assis. ASSIS.

KAIZER !!

La voilà qui tourne sur elle même, en essayant de se retrouver face au chien, qui comme un fait exprès, change à chaque fois de direction. Un véritable ballet.

Au bout de 5 minutes, Kaizer y met enfin du sien et s’assoit de traviole. Une demi-victoire qui fera bien l’affaire. Madame Stressée peut enfin arrêter de danser la gigue avec ses pieds, et le Disco avec ses mains. Dans le doute, elle rajoute quand même 3 « Pas bouger ! » et un « bon, maintenant, tu arrêtes ! », au cas où… on n’est jamais trop prudent. Kaizer tourne la tête, et se fait immédiatement rappeler à l’ordre. Il rebouge la tête. Madame Stressée agite nerveusement la laisse en laissant échapper un tonitruant :

« Pas BOUGEEEEEER ! »

Et pan, il se relève !

Madame Stressée jette à son moniteur un regard désespéré. Cela fait 5 minutes qu’il a arrêté son discours pour regarder la scène en soupirant.

Tu vois ? Il ne se pose jamais !

Et le moniteur de répondre :

Comment donc veux-tu que ton chien se pose si tu TOI, tu ne te poses jamais ?! Tu es en permanence en train de le solliciter et de te tortiller dans tous les sens !

Madame Stressée est interloquée. Comment ?! L’expression « se poser » peut donc aussi concerner la partie humain du binôme ?!

Le moniteur rajoute calmement :

Pose toi. Arrête de bouger, et fiche un peu la paix à ton chien. C’est pas lui qui a besoin d’un Tranxen, c’est toi !!

Madame Stressée reste interdite. Rassurez-vous, elle n’ira quand pas jusqu’à faire une relation de cause à effet… faudrait quand même pas pousser.

En attendant, il ne vous reste plus qu’à vous munir de 2 fers à béton, et de clouer les pieds de Madame Stressée au sol. Voilà. Elle va « se poser » drôlement mieux. Immobilisez-lui en plus les mains, bâillonnez le tout, et l’affaire est dans le sac.

Ou alors, offrez à Kaizer un kennel pour les moments d’attente durant le cours.


 « Ne pas laisser son chien tirer »

Avoir un chien qui tire en laisse, c’est le souci Numéro 1 des adhérents de Club, la figure imposée du moniteur.

Et son pire cauchemar.

A chaque nouvel adhérent, à chaque nouveau groupe, vous ressortez votre ritournelle. Vous passez tout le cours à montrer, démontrer, expliquer. Tout y passe, de la tenue de laisse à la présentation des outils disponibles, que vous avez toujours dans votre sac au cas où : le collier-ceci, le harnais-machin, la laisse-mega-top. Vous veillez bien à leur rappeler que chaque outil à un mode d’emploi, que cela ne dispense pas de l’apprentissage.

Vous remontrez encore et encore la « technique de la statue », les « 3 pas en arrière », le « rappel au bon moment », la « laisse molle », le « demi-tour-sur-soi » ou suivant votre approche, le « coup de sonnette », « la main au collier », la « caresse sur la joue », et j’en passe. Vous insistez 20 minutes sur le fait de ne pas attendre que le chien soit appuyé en bout de laisse pour agir. Vous allez même jusqu’à expliquer, en long en large et en travers, le réflexe d’opposition.

Tout le monde semble bien attentif, et après quelques essais, refait exactement les gestes que vous leur avez montré.

Vous pensez naïvement :

C’est bon, ils ont compris. Ça, c’est fait.

Vous ne comprenez pas très bien comment ceux qui sortent d’un autre cours, voire qui ont suivi le cours « chiot » et le cours « intermédiaire » ne savaient pas déjà tout ça et avaient encore des soucis. Pourtant leurs moniteurs ne sont pas du genre à faire l’impasse sur ces bases… étrange.

En fin de cours, vous refaites une 22ème fois le tour du sujet, et prenez congés de vos adhérents, avec la conscience tranquille et la satisfaction du travail bien fait.

En partant, vous leur lancez une dernière fois :

Et surtout, rappelez-vous : la règle numéro un, c’est surtout de ne plus jamais laisser votre chien tirer. Jamais, jamais, JAMAIS !!

Maintenant, vous savez quoi faire et comment faire quand cela arrive.

Vous ouvrez la porte du terrain, et vous les regardez s’éloigner…

… tous en drapeau derrière leurs chiens, se laissant joyeusement trainer en bout de laisse jusqu’à leur voiture.

Vous n’avez plus qu’à aller ramasser les harnais et autre matériel que vous avez laissé au milieu du terrain, et d’aller vous pendre avec.


« Anticiper »

J’avais gardé le terme le plus compliqué pour la fin. Anticiper. Faire preuve d’anticipation.

Je ne parle bien sûr pas de romans d’anticipation, où il est question d’imaginer, de façon plus ou moins fantaisiste, un futur hypothétique qui se termine avec une invasion d’aliens hyper-méchants qui veulent asservir la Terre. Non, je vous parle bien de choses qui ont, en toute logique, 99% de se passer dans un futur très proche.

Je ressors mon bon vieux dictionnaire.

anticiper (verbe transitif indirect)

Prévoir, supposer ce qui va arriver et adapter sa conduite à cette supposition.

(Dictionnaire Larousse)

Effectivement, c’est un terme compliqué. Il est question 1) de prévoir, et 2) de s’adapter.

C’est une compétence absolument essentielle du moniteur. Et malheureusement une que les adhérents laissent bien souvent à l’entrée du terrain.

Pourtant, l’adhérent sait anticiper. Quand il est dans sa voiture, sur la route du club canin, et qu’il voit la voiture devant lui ralentir et mettre son clignotant, il se dit

Oh oh ! La voiture de devant va tourner !

Il prévoit donc ce qui va se passer. Et il s’adapte. Il ralentit lui aussi, pour ne pas lui rentrer dedans. Il adapte sa vitesse à la situation.

Mais à la seconde où il est arrivé au club, qu’il coupe le moteur, sa capacité d’anticipation disparait comme par magie, à en faire blémir Garcimore.

 En fait, « s’adapter », l’adhérent en est souvent capable. C’est « prévoir » qui est le plus difficile.

Sauf Monsieur Stressé. Lui, arrive très bien à  imaginer toutes les situations potentiellement probables, improbables et même celles totalement impossibles. Pour le coup, l’invasion des aliens, il l’a prévu. Par contre, c’est « s’adapter » qui lui pose souci. D’où les 6500 « Et comment je fais si …? » auquel il vous faudra lui répondre en cours.

Mais oublions ce cas particulier pour nous centrer sur la difficulté des autres adhérents à prévoir. Mais prévoir quoi, allez-vous me demander ?

Quelque chose de totalement inimaginable : Prévoir que son chien ait un comportement normal… de chien.

Les champions toutes catégories du manque d’anticipation, c’est Monsieur et Madame Affectifs. Pour la bonne raison qu’ils ignorent encore qu’ils ont un chien au bout de la laisse.

Dès l’École du Chiot, ils avaient déjà du mal à anticiper. S’ils avaient un jour imaginé que Chéri, bouvier bernois de son état, ferait  plus de 40kg adulte, ils se seraient soucié de lui apprendre la marche en laisse sans tirer avant qu’il ait atteint sa pleine puissance. Mais comment auraient-ils pu le prévoir ?!

De même Mademoiselle Affective, qui finit son internat en Médecine (avec un emploi du temps à faire pâlir un condamné aux travaux forcés), n’aurait jamais pu imaginer que Speed, son jeune border, vivrait mal ses absences. Comment prévoir qu’un chien aurait du mal à rester seul 170h/semaine ?!

Dit comme cela, cela fait forcément grincer des dents.

Je sais, je cite des « cas extrèmes »… Mais je peux vous en trouver de plus courants.

Qui n’a jamais vu les adhérents s’entasser à la porte du terrain ? Il y a 5000m² de terrain disponible autour, mais non, ils sont tous sur les 10m² devant le portail, avec les chiens non détendus, et donc bien excités, tous côte à côte.

Ou le maitre de Flipette, qui va s’installer au bout de la trajectoire du rappel d’Attila (qui, faut-il le préciser, fait si peur à Flipette…) ?

Ou celui qui lance son jouet en fin de parcours, droit sur les chiens attachés au bord du terrain ?

Ou le corolaire de l’exemple précédent : les maitres qui attachent leur chien juste à 5 mètres en ligne droite de la fin du parcours ?

Ou les maitres de Speed et de Torpille, les deux jeunes mâles en plein dans l’age « couillon »,  qui s’installent à moins de 2mètres l’un de l’autre ?

Ou bien le maitre de Goofy, qui détache son chien pour l’exercice de « marche-au-pied-sans-laisse », alors qu’il est visiblement focalisé sur la partie de jeu qui se passe de l’autre côté du grillage ?

Ou l’adhérent Hyper-Motivé, qui court se mettre en place, avec sa « pochette à récompenses » XXL qui balotte à sa ceinture, bien sûr grande ouverte (sinon c’est moins drôle), et qui vous sème des morceaux de knakis sur la moitié du terrain…

Je suis sûre que vous pouvez citer encore un sacré paquet de situations, où un peu d’anticipation n’aurait pas fait de mal.

Ne croyez pas que j’en veuille aux adhérents qui ont du mal à anticiper. Après tout, cela fait partie de l’apprentissage, et c’est notre boulot de moniteur de leur en faire prendre conscience. J’ai moi-même causé quelques calvities à mes moniteurs, en tant qu’adhérent. Mais il arrive déjà suffisamment de situations qu’on ne pouvait pas prévoir, sans s’en rajouter une couche. De plus, ce manque d’anticipation peut mettre en difficulté les autres équipes, voire créer des situations à risque, que tout le monde souhaiterait éviter.

Le pire étant que ce sont les mêmes maitres qui vous demanderont un jour où l’autre :

Mais au fait, comment on fait pour séparer des chiens qui se battent ?

Vous en déduisez que soit, cela leur est arrivé (comme vous le prévoyiez depuis des mois, et vous vous en voulez de ne pas leur avoir fait correctement comprendre avant), soit qu’ils aient réalisés que cela puisse arriver (et là, c’est une excellente nouvelle, pour tout le monde). Et vous leur faites part de la réponse suivante (que j’ai moi-même reçue un jour) :

Mais voyons, c’est très simple ! La meilleure façon de mettre fin à une bagarre de chiens, c’est …

….de faire en sorte qu’elle n’arrive pas ! En gros, d’ANTICIPER.

En général, s’en suit un grand silence et un regard plein d’incompréhension.

Pour le coup, on croirait presque que vous leur parlez de science-fiction, et que les aliens débarquent.

Posted in Coin des coachs, Humour, Les Chroniques de Retex and tagged .

Retex, moniteur de club canin, la part potache et caustique de l'auteur du site, qui ressort parfois les soirs de pleine lune...

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